Je voudrais partager ici ma modeste réflexion suite à l’appel de Maître Louis Gaston Mayila, Président de l’UPNR, et bien d’autres organismes de l’opposition pour une réconciliation nationale afin de sortir notre pays de l’impasse. Je vais commencer par la question de l’impasse. Demain ou après-demain, j’aborderai la question de la réconciliation nationale.
Il y a d’abord eu le Premier Ministre Casimir Oye Mba tout dernièrement sur les antennes de TV+. Il demandait au Président Jean Ping de négocier avec Ali Bongo pour sortir de l’impasse : « Le pays est bloqué », disait-il. Voici vient d’apparaître le groupe des signataires de l’appel à la réconciliation nationale sous le leadership de Me Mayila avec pour objectif la sortie de l’impasse.
Il me semble assez curieux que ce soit l’opposition qui se trouve gênée, sinon accablée, par l’impasse que, dit-on, traverse le Gabon. En effet, après avoir écouté le dernier discours à la nation d’Ali Bongo, le Gabon semble ne traverser aucune impasse, du moins au niveau politique. Et cette attitude n’est pas nouvelle chez l’homme : en décembre 2016, juste après son forfait, il a clamé « l’élection est derrière nous » ; en août 2017, au moment où tout le monde attendait de lui une sortie honorable, il a seulement reconnu la crise économique dont il a attribué les responsabilités à la chute du prix du pétrole et à la conjoncture internationale tout en affirmant sa volonté de se maintenir au pouvoir.
Depuis 2016, les affidés du pouvoir, leurs griots et leurs médias-mensonges ne cessent de dire que tout va bien et qu’il va falloir tourner la page des présidentielles. Quelle est donc cette impasse qui gêne tant Casimir Oye Mba, Louis Gaston Mayila et compères que ne semble pas du tout subir le pouvoir en place ? A lire et comprendre les attitudes, le comportement et les déclarations des tenants du pouvoir, on conclurait que pour eux il n’y a aucune impasse au Gabon à l’exception d’un mauvais perdant et d’une bande de voyous qu’on traque, enlève et enferme sans aucune forme de procès.
Pour ce qui est de la situation économique, là encore, les communicants du pouvoir nous font comprendre qu’il n’y a aucune impasse. Les raisons des difficultés économiques et financières actuelles sont ailleurs que dans la crise post-électorale. A les entendre, cette crise économique et financière n’est pas non plus du fait de leur gestion scabreuse, approximative et inintelligente de ces huit dernières années. A lire les auto-congratulations et auto-satisfecit des différents communiqués finaux des Conseils de Ministres, tout va bien au Gabon : d’ailleurs les salaires des fonctionnaires sont régulièrement payés et l’Etat honore ses principaux engagements, même si la dette grimpe (64% du PIB) et que les PME locales et les retraités peuvent toujours attendre. Où est donc l’impasse qui gênerait tant l’opposition gabonaise ?
Pour ce qui est de la crise sociale, tout y est également pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Les ralentisseurs et les fauteurs de trouble sont les syndicats : ils ne veulent pas travailler ; c’est d’ailleurs pourquoi on est prêt à radier plus de 700 enseignants (alors que le pays vit déjà un déficit sans précédent en matière de personnel enseignant au point que le Ministre de l’Education Nationale planifie de recruter au moins 1000 enseignants dans le courant de l’année). Dans le même temps, si certaines choses ne marchent pas sur le plan social, c’est-à-dire que si les bourses des étudiants et élèves ne sont pas payées depuis des mois, si les universités et grandes écoles ont du mal à démarrer l’année académique 2017-2018, si les écoles et lycées sont en lambeau au point de vouloir les réfectionner à coup d’ordinateurs et internet alors qu’en huit ans aucune salle de classe n’a été construite, si les hôpitaux manquent de structures et que les femmes accouchent à même le sol avec espoir que les bus médicalisés promis auront des sièges d’accouchement, si la CNAMGS ne paye pas les officines pharmaceutiques et sanitaires, si les retraités ne sont pas payés et que la CNSS joue au saute-mouton, si le déficit de logement est devenu abyssal au point de faillir faire pousser des cheveux à Bruno Ben Moubamba, si les travaux d’infrastructures routières sont aux arrêts depuis Mathusalem, si Port-Gentil est devenu la capitale des licenciements économiques et des fermetures d’entreprises, si le chômage bat son plein au point d’ambitionner de créer 10 000 emplois en un an alors qu’aucun n’a été créé en huit ans, si les agents de l’Agence Gabonaise de Presse (AGP) n’ont pas de salaire depuis 10 mois, si les grèves foisonnent dans les administrations aussi bien publiques que privées, Etchenda, Etchenda, oh pardon, etc. etc., le billet Makaya du quotidien l’Union nous a dernièrement édifiés sur les responsables de ces quelques difficultés sur le plan social.
Ce sont, a dit Makaya, ces gens de l’entourage d’Ali Bongo qui sabotent le tout travail de ce dernier pour leurs intérêts personnels. On a même vu avant l’ordinaire congrès extraordinaire du PDG un grand pédégiste de Makokou, grand Alien, pardon, aliste devant l’Eternel, publier des notes incendiaires contre Emmanuel Issoze Ngondet, le PM d’Ali Bongo, l’accusant même d’être un agent double au service de Jean Ping (on a eu ainsi à apprendre que Issoze Ngondet serait un pur produit créé par Jean Ping aux Affaires Etrangères où les agents d’ailleurs en grève en ce moment). En gros, même sur le plan social, tout va bien à part l’indiscipline d’une petite bande de l’entourage d’Ali Bongo.
Ainsi, de quelle impasse parlent les opposants qui appellent à négocier avec Ali Bongo ? Aussi de quelle négociation serait-il quand Ali Bongo lui-même n’en exprime plus le besoin ? Pour Ali Bongo, l’élection est derrière, il a organisé un dialogue avec l’opposition (sic), l’heure est maintenant à l’application des accords issus de ce dialogue. Ali Bongo vous a t-il dit qu’il voulait à nouveau dialoguer ?
Pour Ali Bongo et ses communicants, le pays n’est pas bloqué. Et si le pays était bloqué comme le disent certains opposants, qui le bloque ? Ces leaders de l’opposition insinuent que c’est le Président Jean Ping qui bloquerait le pays. Veulent-ils nous faire croire que c’est Jean Ping qui est responsable de la crise multiforme du Gabon, alors qu’Ali Bongo et ses communicants trouvent les causes de ces problèmes ailleurs ? Avez-vous déjà entendu Ali Bongo dire que c’est Jean Ping le responsable des problèmes actuels du Gabon ?
Pourquoi alors insinuer que Jean Ping serait à l’origine du blocage au Gabon ? A cette allure, vous finirez pas dire que si Ali Bongo échoue dans tous ce qu’il fait (même organiser des Sarakolés et autres camerounais pour l’applaudir à Paris), s’il a fait une réchauffé des promesses au soir du 31 décembre 2017 en lisant simplement quelques pages de son projet « L’Avenir en Confiance » de 2009 (le pauvre, son entourage ne l’a pas informé que citer ses propres écrits sans en faire référence à la source c’est du plagiat contre soi-même, et c’est punissable par la loi), ce serait de la faute de Jean Ping.
Et si c’est Jean Ping qui bloque le pays, quelle logique y a-t-il que ce soit lui encore qui prenne l’initiative d’aller négocier ? D’ordinaire c’est ceux qui sont accablés par un blocage qui appellent l’instigateur du blocage à la négociation et non l’inverse. Quand Casimir Oye Mba, Louis Gaston Mayila et consorts insinuent que c’est Jean Ping qui bloque le pays et qu’il devrait aller négocier avec Ali Bongo pour sortir le pays de l’impasse, il me font penser à quelqu’un qui demande au preneur d’otages d’aller négocier avec les autorités qu’il essaie d’attaquer par cette prise d’otages. Ils me font penser à un juge qui dirait un plaignant : « Vas négocier avec celui qui a cambriolé chez toi en tuant ton chien, tes employés de maison et tes enfants pour que tu suives désormais ta tv écran plasma avec lui chez lui et quand il veut ».
N’est-ce pas le monde à l’envers ou bien c’est moi avec ma tête d’universitaire qui suis trop idéaliste ? Je crois que même nos enfants de lycées et collèges qui deviennent de plus en plus goudronniers et chefs de goudronniers au kobolos trouveraient illogiques la démarche que les leaders de l’opposition proposent à Jean Ping.
Pour rappel et précision, le Président Jean Ping n’a jamais été opposé au dialogue avec Ali Bongo. Il a toujours dit qu’il est disposé à discuter avec Ali Bongo des termes du départ de ce dernier tout en lui garantissant paix et sécurité à lui et à son entourage immédiat.
Hugues Steve N. Koumba-Binza, PhD.